01.03.10

(deux poèmes de métro)
poème n°1
* c’est soleil et je me laisse avaler sous la butte, plein la craie creuse qui de loin en loin ouvre un immeuble en deux — un dans quoi j’ai vécu béa un matin par le mur de sa cave — cré crevé dont il fallut trembler tous.
* la butte est ce par quoi j’ai découvert paris à vingt ans — sur un banc de la place du calvaire — cette barquette de frites, puis des moineaux à quoi je l’ai donnée une à une.
* (le strapontin m’agrée, il m’isole (en arrivant à la station j’ai décorné un bœuf).)
* pigalle — ma mère et sa sœur au début des années cinquante y badant, avec leur tante, leur oncle — puis l’oncle sous les brocards des macs imaginant que les trois femmes sont à lui.
* je sais ce matin quelqu’un levé dans la joie — d’où, à l’envers, mon déplaisir ? certain embarras de trop d’alcool la veille ? la jongle de mes cheveux sans machette ? mon avance au lieu de ma ponctualité ? dehors le vent ?
* personne ou quasi dans la rame, il y a vingt ans mes premiers trajets en métro me donnaient mal à la tête.
* j’irai, si tout va bien, cet après-midi bader au luco — je savais dire luco avant d’y mettre un pied car j’avais lu matzneff — j’ai su aussi grâce à simon [claude] le son sourd — de tourbe un peu, contre un gong ou quasi — des chevaux à la course avant auteuil.
* songeant encore à pigalle il me revient du goût pour les deux, trois putains de la rue andré antoine — l’odeur, un soir, de nylon d’une perruque, ou bien d’un bas (à lille c’était sur la place aux bleuets).
* madeleine — je me rends rue du bac où venant à paris je savais que vivait souchon — et c’était yves simon place dauphine, montand, signoret.
* la concorde sous quoi je suis je l’ai traversée jadis à bicyclette en disant des insultes, en allant sans jeter l’œil à gauche ni à droite avec l’espoir de faire sourdre quelque chose fort, plus que la mort en tout cas et qui me laisserait sans chair, sans os, et insensible aux tôles.
* la rame s’emplit, les têtes ne me retiennent pas, je ne retiens pas les têtes, sauf peut-être bien ces grosses lèvres boudeuses ânonnant au bord d’un livre.
* « ne pas descendre sur la voie / danger de mort »

poème n°2
* je reviens de manger du porc en tranchettes chez minh chau, de boire un peu de bière, de traverser la seine (qui brasse des tessons, que ses tessons saturent) après des pâtes aux seiches.
* tout à l’heure à l’entrée du musée, une femme a planté des épingles pour afistoler son chignon, c’est un geste éminent.
* l’inverse vaut (fanny ardant débridant le sien au miroir, pendant vivement dimanche).
* tout à l’heure aux « drogueries d’aujourd’hui » c’était de la bûchette en sacs, des pots, de l’engrais — n’était ce froid qui pince : le printemps.
* j’ai vu des vanités plein le musée maillol, pour l’heure j’en retiens peu, un autoportrait de mapplethorpe, des crânes d’hélion, un braque.
* la poix tartinée de yan pei-ming.
* j’en retiens peu — la mort qui de la mort soulage, un instant mais beaucoup, la peur pire un instant repoussée.
* avant la gare du nord toutes les lumières s’éteignent — ne restent, chiches, que les veilleuses — un stress bref — à quoi ressemble mon crâne ?
* (au luco tout à l’heure, dans la froidure et le venteux c’était le doux des petites voiles sur le bassin circulaire, des balles dans le cordage des raquettes ; du sable des allées des années.)
* en cas d’attaque terroriste dans le métro parisien, quelle est la probabilité pour qu’au moins l’une des victimes soit à l’instant de l’explosion en train de rédiger un poème de métro ?
* les vanités me haussent.
* mine de rien me haussent.

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