22.02.10

Deux poèmes de métro

Principe :
Le poème de métro, inventé par jacques jouet, « est un poème composé dans le métro, le temps d’un parcours.
Un poème de métro compte autant de vers que votre voyage compte de stations moins un.
Le premier vers est composé dans votre tête entre les deux premières stations de votre voyage (en comptant la station de départ).
Il est transcrit sur le papier quand la rame s’arrête à la station deux.
Le deuxième vers est composé dans votre tête entre les stations deux et trois de votre voyage.
Il est transcrit sur le papier quand la rame s’arrête à la station trois. Et ainsi de suite.
[...]
Le dernier vers du poème est transcrit sur le quai de votre dernière station.
Si votre voyage impose un ou plusieurs changements de ligne, le poème comporte deux strophes ou davantage. »

Poème n°1
* je préfère au métro l’autobus ou mes pieds (douze (pieds) en l’occurrence — gare aux réminiscences).
* en quatre-vingt-neuf, à mabillon, je me suis évanouie dans l’escalier mécanique (de la station) donnant sur le boulevard.
* ceci sans rapport avec cela, quoique j’y eusse laissé une chaussure — je portais alors de gros souliers de garçon — dont je revois, précis, le pied gauche au milieu du trottoir — une bosse m’est venue au front.
* barbès, je viens de passer barbès, les héros de barbès lancent des sos, comment alors imaginer que plus tard j’en vivrais proche — c’était alors le lycée avec la petite mauve et puis le goût des filles.
* comment se dépêtrer d’un vers quand un vers ne vient pas — de gare à gare : rien, hors les points cardinaux (songerie brève et rose des vents (j’allais écrire « des sables » et rêvasser ailleurs quand le quai point)).
* à mabillon en quatre-vingt-neuf les pompiers sont (inter)venus ; la honte alors me cuisait plus que la fièvre.
* il entre de la nostalgie dans mon trajet, il entre mabillon, il entre les années de sorbonne et ma chambre au huitième.
* (l’œil levé sur l’éclat des faïences à strasbourg-saint-denis)
* « à la fin de la semaine on avait une de ces barres » — c’est derrière, deux garçons après, dans l’œil, des feux de signalisation à l’entrée du tunnel — rouges.
* dans le métro, j’observe peu les gens, la lumière est trop crue, les distances trop proches, je suis mangée.
* dans le métro je lis — hors métro aérien dont les décors m’aimantent.
* une châtaine à ma droite et cette écharpe grège.

Poème n°2
* un garçon manque jeter un tee-shirt de l’autre côté des voies comme la rame arrive — il a bu — j’ai bu aussi — assez peu pour savoir qu’il aurait tort d’agir et je sens sur lui passer le vent du boulet.
* je ne tiens plus mon stylo comme naguère (la faute au clavier) — mes hampes sont perdues, je dois renoncer en m’en navrant à la pierraille débaroulée des petites lettres — mais l’illisibilité revient, au moins ça.
* on observe que je griffonne, on s’en surprend peut-être un peu — qui s’avise encore de promener dans son rucksack un crayon et un cahier ?
* (une fille parle trop fort mais sa bouche est cerise)
* un garçon rond transporte des tongs et des lunettes de soleil. je pense à —
* j’y pense un peu, à peine, j’y pense avec la douceur de ce qu’à cette heure les lueurs offrent de pâlichon.
* le grand garçon debout s’efforce — bien lui fasse — de me lire à l’envers — il a de l’élégance due à son port, son écharpe (je dois, décidément, les goûter ces écharpes).
* plus rien ne vient, les teints sont blêmes et combien crus les néons — barbès encore.
* des saouls s’écharpent (ah) — t’as pas de politesse t’es pas poli tu stresses ton monde — il porte une casquette d’aviateur — l’autre se rassoit, l’ayant traité de con. se relève pour gueuler mieux à château-rouge.

2 commentaires:

Frédéric a dit…

Merci. Merci aussi pour le souvenir consécutif de ce quai où tu préféras l'arracher.

patrick a dit…

j'aime beaucoup ce blog où tout m'impressionne.